Article datant du mois dernier mais très interessant.
Source : La vie.fr
De moins en moins d’adoptions, toujours plus d’agréments. Faut-il pour autant en revoir les critères d’attribution ? Le point avant la remise du rapport Colombani.
Par Dominique Fonlupt
1 Délivre-t-on trop d’agréments ?
Chaque année, 9 000 agréments sont accordés à des couples mariés (neuf fois sur dix) et à des « célibataires » (femmes seules, avec ou sans enfants). Un nombre en progression constante. Parallèlement, le nombre d’enfants adoptables diminue, les pays d’origine préférant opter pour des solutions internes. Aujourd’hui, on estime qu’il existe dans le monde un enfant pour cinq candidats à l’adoption. Et force est de constater que les États confient en priorité leurs enfants adoptables à des couples mariés, jeunes, en bonne santé, et dotés d’un patrimoine solide. Un quart des titulaires d’un agrément en France ne parviendront jamais à adopter. Trop d’agréments ? «Le problème n’est pas uniquement là», estime Karine Bodart, de l’Espace Paris adoption, un service d’accompagnement mis en place par le département. «Notre objectif est de faire prendre conscience aux candidats de la réalité de l’adoption dès le début de leur démarche. Nous devons notamment déterminer s’ils sont prêts à accueillir un enfant avec son histoire particulière et s’ils pourront répondre à ses besoins. Le reste – la composition de la famille, etc. – relève plus de la vie privée.» Ainsi, à Paris, une quinzaine d’agréments seulement sont refusés pour environ 500 accordés, avec une proportion exceptionnelle de célibataires (un tiers des demandes contre une sur dix en moyenne en France). En revanche, en Seine-Maritime, on dénombre 25 refus pour une centaine d’accords. On le voit, malgré un critère unique et commun – l’intérêt de l’enfant –, on obtient plus ou moins facilement l’agrément selon son département de résidence. Pourquoi ? Sans doute à cause d’une approche très différente de la parentalité adoptive. En Seine-Maritime, on s’interroge sur les ressorts du désir d’enfant, refusant d’en faire un droit inconditionnel. «Nous devons vérifier que le projet d’adoption est avant tout bon pour l’enfant, explique la présidente de la commission d’agrément de la Seine-Maritime. Nous avons eu le cas d’un couple recomposé. L’épouse avait 53 ans et souhaitait “donner” un enfant à son époux de 40 ans. Il a fallu motiver un refus sans mentionner l’âge, un critère qui ne tient pas en cas de recours devant le tribunal administratif qui va statuer selon le droit.» Selon une étude réalisée par Catherine Villeneuve-Gokalp, de l’Ined, les motifs les plus souvent invoqués lors d’un refus sont, dans l’ordre, «une perception insuffisante de la spécificité de l’enfant adopté», l’immaturité d’un projet jugé «prématuré», «une attente différente entre les deux conjoints » ou encore l’absence de « deuil de l’enfant biologique».
2 Pourquoi les célibataires peuvent-ils adopter ?
7 % des adoptants aujourd’hui sont des femmes vivant seules – célibataires, divorcées, veuves avec ou sans enfants. Suite à l’hécatombe de 1914-18, l’État avait accordé la possibilité à des femmes, même célibataires, d’adopter des pupilles. «Seule la présence éducative comptait», explique Christian Flavigny, psychanalyste et spécialiste de la question, auteur de Parents d’aujourd’hui, enfant de toujours. À partir de 1966, cette adoption simple a été largement remplacée par l’adoption plénière, qui, elle, crée un lien de filiation. Il ne s’agit plus seulement d’être un bon éducateur pour l’enfant, mais d’en être parent. «Tout comme une naissance, l’adoption plénière est un enfantement. Un enfant peut-il être le fruit d’un seul désir?», s’interroge Christian Flavigny, pour qui une femme sans homme ne sera cependant pas forcément une mauvaise mère adoptive. «Lorsque je mène un entretien avec une postulante célibataire, mon souci est de l’amener à s’interroger sur ce qui a fait obstacle à sa rencontre avec un homme qui l’aurait rendue mère. Les maternités biologiques empêchées révèlent souvent des difficultés relationnelles avec sa propre mère. Si la postulante reste dans le déni d’une difficulté de transmission du lien maternel, cela peut entraver sa relation future à l’enfant, et je ne peux pas donner un avis favorable.» On le voit, l’approche psychanalytique de Christian Flavigny se heurte à l’approche strictement juridique de la Cour européenne des droits de l’homme, qui a, par exemple, fondé sa condamnation de la France sur le caractère «discriminatoire» du refus d’agrément à une homosexuelle.
3 Quelles sont les réformes possibles ?
Des mesures restrictives seraient très impopulaires. L’opinion publique, très sensible aux souffrances liées au désir d’enfant, est plutôt portée à croire que l’administration met volontairement des bâtons dans les roues des postulants. La seule limitation qui semble recueillir un relatif consensus serait d’introduire un écart d’âge maximum – 45 ans – entre le plus jeune membre du couple et l’enfant. Il n’est pas rare que des conjoints d’une cinquantaine d’années se rêvent parents d’un nourrisson. Une autre piste consisterait à accompagner davantage les couples vers l’adoption d’enfants plus âgés ou de fratries. L’adoption n’est-elle pas d’abord l’art de donner une famille à des enfants qui n’en ont pas ?
Plus de chances pour les français
La mission Colombani devrait proposer une solution pour permettre aux candidats français d’augmenter leurs chances d’apparentement avec un enfant étranger. En effet, depuis la création de l’Agence française de l’adoption (Afa) par la loi de 2005, la situation internationale a beaucoup changé. La demande, qui émanait surtout des États-Unis et de la France, s’est élargie à de nouveaux États comme l’Espagne, l’Italie et l’Europe du Nord. Par ailleurs, les pays d’origine demandent de plus en plus souvent une participation financière en contrepartie des apparentements. Les Chinois, par exemple, répondent en priorité à la demande américaine, relayée par des agences privées qui ont bien compris l’intérêt de se montrer généreux. La loi de 2005 créant l’Afa n’a pas prévu de budget d’aide aux établissements locaux de protection de l’enfance, contrairement à d’autres agences étrangères. Le rapport Colombani pourrait proposer une modification de la loi qui permettrait à l’Afa de participer à des microprojets (réfection de sanitaires d’un orphelinat, paiement de la formation des nourrices…). Soit par le biais d’une fondation ad hoc abritée par la Fondation de France, soit en octroyant directement à l’Agence des fonds, puisés vraisemblablement dans le budget de la coopération.
Qu'en pensez-vous. J'avoue que cette histoire de limite d'âge entre parents et enfant m'inquiète un peu. Mais qu'est-ce qu'ils ont tous contre les gens de plus de 45 ans ?
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