3 162 enfants étrangers ont été adoptés en France en 2007. Soit 20 % de moins qu'en 2006. Révélée par les statistiques du ministère des Affaires étrangères, cette baisse est historique. Et elle est d'autant plus cruelle que personne, au sein des associations d'adoptants, n'a oublié les promesses bien imprudentes de Jean-Pierre Raffarin. En 2005, alors Premier ministre, il soulevait un immense espoir en initiant une vaste réforme de l'adoption et en promettant officiellement de doubler le nombre d'adoptions réalisées par des Français à l'étranger. Prophétie dont il doit aujourd'hui se mordre les doigts, car depuis la réforme, ce chiffre, bien loin d'être multiplié par deux, ne cesse de baisser. Pour les 8 000 foyers agréés chaque année par la DDASS, dont les chances d'adopter en France sont quasi nulles, les années d'attente se succèdent, et le mécontentement s'installe. La toute nouvelle AFA - Agence française de l'adoption -, navire amiral de la réforme, est rendue responsable, comment pourrait-il en être autrement, de ce douloureux ralentissement. "Mais c'est la situation internationale qui a brusquement changé, l'AFA n'y est pour rien", s'indigne son président, le député UMP Yves Nicolin. "Depuis 2005, de nombreux pays ont signé la Convention de La Haye, qui interdit les démarches individuelles, mode d'adoption jusqu'ici privilégié par nos concitoyens. En outre beaucoup d'autres États choisissent depuis peu de favoriser l'adoption locale, et se ferment aux demandes étrangères. Résultat : le nombre d'enfants adoptables dans le monde diminue, alors que la demande est exponentielle. Il y a vingt ans, il n'y avait guère que les États-Unis et la France qui adoptaient à l'étranger. Aujourd'hui, tous les pays occidentaux sont demandeurs. La donne a brusquement changé, et nous ne sommes pas les seuls à connaître une telle baisse en 2007." Les États-Unis, le Québec affichent en effet des chiffres en diminution. Mais l'Italie semble clairement tirer son épingle du jeu. Avec beaucoup moins d'années d'expérience sur l'échiquier de l'adoption internationale, les Italiens font déjà mieux que la France. Pour 2007, 3 420 adoptions étrangères ont été réalisées dans la Péninsule. Une hausse de 6 % par rapport à l'an dernier, qui prouve que dans un contexte en effet peu favorable, leur réforme s'avère plus efficace. "En Italie, on a fait le choix de subventionner les organismes agréés pour l'adoption, de leur donner les moyens d'agir, explique Kim Charvet, de l'association Coeur Adoption. Chez nous, notre bel organisme public, pourtant doté d'un budget de quatre millions d'euros, a mis des mois à s'installer, souffre d'une méconnaissance du terrain et peine à se faire reconnaître dans les pays où la France tente de se faire accréditer. Les autorités locales ne comprennent pas le rôle cette agence publique. D'où des procédures qui s'éternisent. Pendant ce temps, des organismes agréés pour l'adoption tel que Médecins du monde, avec des budgets dérisoires, continuent de réaliser un nombre stable d'adoptions." Janine et Franck ont fait une demande d'adoption au Cambodge par le biais de l'AFA. Ils savent que l'Agence ne pourra y envoyer qu'une centaine de dossiers en 2008. Ils sont sur liste d'attente. "Il y a plus de 500 dossiers devant nous, nous n'avons aucun espoir", disent-ils. Dans quelques jours, Jean-Marie Colombani devrait rendre son rapport sur l'adoption internationale. Il s'est, semble-t-il, intéressé à la réussite italienne. Janine et Franck attendent de ses conclusions un miracle.
Source : Le Point 22/02/2008
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